Patrick Mouratoglou: Le timide devenu coach vedette

05/10/2021

Je n’avais pas de relation dans le tennis. C’est un milieu dans lequel tout le monde se connaît, j’étais un ovni. C’est un milieu dans lequel on n’aime pas les ovnis...
Enfant malade de timidité, Patrick Mouratoglou a su devenir, via sa passion pour le tennis, un coach vedette et un homme d’affaires dont le succès iconoclaste en irrite certains. Signe extérieur de réussite: son académie de tennis, inaugurée en 2016 sur la Côte d’Azur. Devant l’entrée du bâtiment s’élève un M monumental. Une initiale stylisée du patronyme du maître des lieux, logo d’une marque aujourd’hui reconnue dans le monde entier. Outre les élèves du tennis-études, une quinzaine de jeunes joueurs s’y pressent à chaque session de détection qu’il organise trois à quatre fois par an et qui lui ont permis de découvrir, notamment, Stefanos Tsitsipas lorsqu’il avait 16 ans. Patrick Mouratoglou, né en 1970 à Neuilly-sur-Seine dans une famille d’origine grecque, a réussi dans les affaires. “Je ne peux pas dire le contraire, mais ça a été accessoire par rapport à l’investissement que j’ai mis dans mon métier de coach. En fait, c’est grâce au succès de mon métier de coach que le business est venu”, insiste-t-il. Cette trajectoire était mal engagée après le refus de ses parents de le laisser se lancer, à l’adolescence, dans une carrière de joueur de tennis, car “ce n’était pas sérieux, ou en tout cas trop risqué”. Une déception d’autant plus grande qu’au cours d’une enfance compliquée, il ne se sentait bien que sur un court de tennis. “J’étais tout le temps malade, je faisais des crises d’angoisse toutes les nuits, j’étais d’une timidité extrême. Je ne regardais personne parce que je savais que le contact visuel avec les gens pouvait les amener à me poser une question. J’étais nul à l’école, avec un père polytechnicien, c’était bien... Et en plus, je me trouvais moche”, raconte-til. A 26 ans, après “dix années d’analyse”, il dit non à son père, homme d’affaires et industriel reconnu dans le secteur de l’énergie, qui lui propose de s’associer dans sa “grosse entreprise”. Car le jeune homme s’est mis en tête d’aider les autres à réaliser le rêve qu’il n’a pu assouvir lui-même: atteindre le plus haut niveau au tennis. Drôle d’idée a priori: “Je n’y connaissais rien. Je n’avais pas de relation dans le tennis. C’est un milieu dans lequel tout le monde se connaît, j’étais un ovni. C’est un milieu dans lequel on n’aime pas les ovnis...” En 1998, pour donner un nom et une légitimité à son académie naissante, sur des courts de Montreuil qu’il louait à la ville de banlieue parisienne, et ainsi attirer de jeunes joueurs avec un potentiel élevé, il convainc Bob Brett, l’ancien entraîneur de Boris Becker, de s’associer à son aventure. Puis il sélectionne un premier groupe de 20 jeunes joueurs, parmi lesquels Marcos Baghdatis qui avait alors 13 ans et demi et qui atteindra en 2006 la finale de l’Open d’Australie (battu par Federer) et la demi-finale à Wimbledon (battu par Nadal). D’abord satisfait de son rôle de dirigeant en costume, il est obligé de changer sa raquette de main lorsque Brett l’abandonne en 2004. “J’avais vraiment envie d’arrêter tellement j’étais effondré”, reconnaît-il. Finalement, il donne son propre nom à l’Académie et décide de devenir coach lui-même... et se donne “10 ans pour gagner un Grand Chelem”. “J’étais sur un terrain toute la journée parce qu’il fallait que j’apprenne un métier, que je sois plus que bon parce que gagner un Grand Chelem, 99% des coachs ne le font jamais”, relève-t-il. Alors quand Serena Williams vient le chercher en 2012, elle propulse la carrière du Français dans une autre dimension. Wimbledon puis l’US Open dès 2012 seront les deux premiers des 10 titres du Grand Chelem qu’ils ont décrochés ensemble. Il n’est cependant pas rassasié. “Je ne regarde jamais derrière parce que ça crée du contentement et le contentement est l’ennemi de la performance”, assène-t-il en ajoutant: “Tout ce qui me fait rêver, j’ai envie de le faire”. Son prochain objectif ? Le lancement, prévu l’an prochain, d’une plateforme de coaching en ligne: un moyen de proposer, via la technologie, un entraînement sur mesure mais à moindre coût. “C’est excitant, car je vais pouvoir coacher tous les joueurs du monde qui le voudront”, s’enthousiasme-t-il. Etendre son empire, toujours dans le tennis.


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