Chavkat Mirzioïev Un réformateur bien autoritaire

Né en 1957 dans la province de Djizak, M. Mirzioïev se lance en politique après avoir décroché un diplôme d'ingénieur agronome

22/10/2021

Le président de l'Ouzbékistan Chavkat Mirzioïev, qui brigue un deuxième mandat dimanche, a extirpé par des réformes son pays d'Asie centrale de décennies d'isolement. Mais pour ses détracteurs, les vieux démons de l'autoritarisme ouzbek sont toujours là.

M. Mirzioïev, un homme trapu aux cheveux grisonnants âgé de 64 ans, devrait remporter haut la main la présidentielle face à quatre concurrents largement considérés comme des figurants.

Il s'apprête donc à rester cinq années de plus à la tête de l'ex-république soviétique qu'il dirige depuis la mort, en 2016, de son terrible prédécesseur, Islam Karimov.

Lorsqu'il arrive au pouvoir après le règne brutal de 25 ans de Karimov, marqué par le travail forcé d'écoliers dans les champs, la torture des détenus ou encore le massacre de centaines de civils en 2005, M. Mirzioïev, Premier ministre sortant, suscite l'espoir en desserrant l'étau politique, modernisant l'économie étatisée et en ouvrant le pays.

Mais cet esprit réformateur a montré ses limites avec une répression accrue des voix critiques à l'approche des élections.

"Aucun parti d'opposition n'a été autorisé à entrer en politiques ces dernières années. Et depuis le début de l'année, les réformes en matière de droits humains ont cessé", relève l'ONG Human Rights Watch dans un bilan pré-électoral.
L'organisation juge que le pays reste "profondément autoritaire".

M. Mirzioïev fait face à un nouveau défi: la situation explosive en Afghanistan, pays frontalier de l'Ouzbékistan où les talibans ont repris cette année le pouvoir, suscitant l'inquiétude de ses voisins qui craignent une déstabilisation d'ampleur régionale.

Jusqu'à présent, le président ouzbek a privilégié le dialogue avec les nouveaux maîtres de Kaboul, tout en menant avec la Russie des manoeuvres militaires à but dissuasif à la frontière afghane, de crainte de voir des groupes jihadistes gagner du terrain dans la région comme dans les années 2000.

Né en 1957 dans la province de Djizak, dans l'est de l'Ouzbékistan, M. Mirzioïev se lance en politique après avoir décroché un diplôme d'ingénieur agronome.
Il devient député dans les derniers mois d'une URSS mourante. Dans un Ouzbékistan désormais indépendant, il devient gouverneur de plusieurs régions avant de devenir, en 2003, Premier ministre de Karimov, jusqu'à la mort de ce dernier.

Après le décès du dirigeant ouzbek, il s'impose en évinçant notamment son principal rival, Roustam Inoïatov, puissant et redouté chef des services secrets.
Ayant les mains libres, M. Mirzioïev ouvre le pays en supprimant les visas pour les visiteurs de nombreux pays dans l'espoir de développer le tourisme.

Il assouplit également le contrôle de l'islam, la religion de la quasi-totalité de la population, alors que le régime Karimov réprimait toutes les expressions publiques de piété, prétextant la menace islamiste.

Sur le front économique, Mirzioïev s'attaque au travail forcé dans les champs de coton, y compris d'enfants, une pratique répandue en Ouzbékistan et qui a fini par coûter bien des contrats au pays.

Dans cette économie ultra-étatiste, il a permis l'émergence d'acteurs privés qui produisent des textiles au lieu d'en exporter simplement la matière première.
En raison de toutes ces réformes, les Ouzbeks "vivent libres et sans crainte", s'est récemment félicité M. Mirzioïev.

Mais, loin de partager ce constat, les détracteurs du président pointent l'arrestation de plusieurs blogueurs critiques ces derniers mois, de quoi réveiller le souvenir du règne de fer de son prédécesseur.

Une loi pénalisant la critique en ligne du président est d'ailleurs entrée en vigueur en mars.
 M. Mirzioïev, qui est père de trois enfants, s'est aussi attiré des accusations de népotisme après que l'une de ses filles, Saida Mirzioïeva, a occupé une fonction dans l'agence de communication du gouvernement.

Elle a quitté son poste l'an dernier après avoir été comparée à la fille aînée de Karimov, Goulnara Karimova, qui a occupé plusieurs hautes fonctions publiques sous le règne de son père et est actuellement emprisonnée pour des détournements de sommes gigantesques.
 


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