Sale temps pour les migrants

Nouvelles opérations d’expulsion vers la frontière algérienne

09/07/2016

L’expulsion des migrants vers la frontière maroco-algérienne sera-t-elle de mise à nouveau ? C’est ce que laissent penser l’arrestation et l’expulsion de huit migrants par les autorités locales d’Oujda le 1er juillet courant. « Ils ont été arrêtés vers 17h00 par une patrouille de la police nationale pour délit de mendicité aux ronds points du centre-ville. Parmi les personnes appréhendées, il y avait  des femmes,  des enfants et deux demandeurs d’asile. Ils seront tous expulsés, quelques heures plus tard, vers la frontière. Les migrants ayant leur carte de séjour ont été libérés», nous a précisé Hassan Ammari, de l’AMDH-section Oujda.
Pourtant, notre source estime que cette mesure ne signifie pas la reprise des expulsions,  une pratique abandonnée par les autorités en 2014. « Il s’agit d’une opération ponctuelle. On est loin du contexte des expulsions méthodiques et récurrentes d’il y a deux ans», nous a-t-il indiqué.      
Mais si les autorités d’Oujda ont gelé cette pratique, celles de la ville de Nador poursuivent leurs opérations de refoulement des migrants vers l’intérieur du pays. Pas plus tard que vendredi dernier, une opération de ratissage a été menée au niveau du campement de Boulingo et s’est soldée par la destruction des abris des personnes migrantes et l’arrestation de nombre d’entre elles. Cette opération a été marquée par des  blessures  infligées à trois personnes dont l’une  serait dans un état grave. « Ces opérations sont devenues une pratique courante dans la région. Les campements et lieux de regroupement des migrants sont sous surveillance permanente de la part des autorités locales qui interviennent chaque fois qu’elles jugent que le nombre de ces migrants a augmenté », nous a déclaré Omar Naji de l’AMDH-section Nador. Selon un rapport de cette ONG, l’année  2015 a enregistré 41 opérations de ratissage et de rafles opérées dans les rues et les souks de la ville ou même dans les hôpitaux, soit 3,5 opérations par mois. Lesquelles se sont soldées par  l’arrestation et la mise en détention de 3.018 migrants.   Ces mesures se sont étendues également aux migrants en situation régulière, à des blessés et à des femmes et des enfants.    
Le même document a relevé, par ailleurs, que les personnes appréhendées ont été détenues hors de tout cadre légal et qu’elles ont été incarcérées dans des lieux qui échappent au contrôle de la Direction pénitentiaire et sans l’aval du Parquet qui n’a pas donné ses ordres, que ce soit pour leur arrestation ou pour la prorogation de leur garde à vue au-delà des 24 heures requises. « Nador est devenue un cas exceptionnel avec la transformation de deux sièges d’administrations publiques en centres de séquestration où des centaines de migrants sont détenus hors de tout contrôle judiciaire alors que les décrets organiques de la loi 03-02 relative aux centres d’arrestation des migrants  n’ont pas encore été promulgués », a noté le rapport.
Cependant, notre source s’interroge sur l’utilité de telles opérations de ratissage et de refoulement vers l’intérieur du pays. « Souvent les migrants s’évadent avant l’arrivée des forces de l’ordre. Seules les femmes,  les enfants  et les personnes vulnérables restent dans les campements. Et mêmes celles qui sont arrêtées et expulsées vers d’autres villes du Maroc reviennent à  Nador quelques jours ou quelques mois après leur évacuation. C’est un vrai cercle vicieux », nous a-t-elle expliqué. Pis, notre source estime que ces rafles et déportations engendrent des charges financières qui sont supportées par le budget de l’Etat.  « La location des autocars transportant les migrants arrêtés coûte cher alors qu’ils n’ont que fort peu de passagers à bord. A titre d’exemple, un autocar reliant Nador à Tiznit revient à près de 15.000 DH et à 10.000 DH pour le trajet Nador-Casablanca ou Rabat », nous a-t-elle précisé. Ledit rapport a noté, en outre, que le choix de ces autocars manque de transparence puisqu’il s’effectue sans appel d’offre légal et concerne uniquement certains propriétaires et pas d’autres. Le budget alloué à la poursuite et à l’arrestation des migrants a été également pointé du doigt puisqu’il demeure un sujet tabou.  


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